Chamallow - Local dédié à l'événementiel
Ce retour d'expérience concerne le cas de la rénovation acoustique d'un local dédié à l'événementiel. Les travaux ont été réalisés dans le but de diversifier la programmation et de minimiser les plaintes.
En plein cœur du centre-ville, un immeuble datant du début des années 60, présente des logements du R+1 au R+6 et des commerces en RdC dont l’établissement « Chamallow ».
En plein cœur du centre-ville, un immeuble datant du début des années 60, présente des logements du R+1 au R+6 et des commerces en RdC dont l’établissement « Chamallow ».
« Chamallow » est un établissement ouvert tous les jours de 17h à 02h. Il propose à sa communauté une programmation variée en fonction des jours et des plages horaires, comme par exemple :
Jusqu’à ce jour l’établissement ne recevait aucune plainte du voisinage par rapport à son activité et sa programmation intérieures, mais uniquement par rapport à la présence de clientèle aux abords de l’établissement.
Le gérant (M. GAIL*) a souhaité dynamiser sa programmation en proposant plus de divertissements afin de faire vivre son lieu. Il propose ainsi :
Son système de diffusion a été modifié en conséquence (sans conseil particulier d’un acousticien et sans étude préalable EINSVoir aussi : CADRE RÉGLEMENTAIRE / Obligations réglementairesPosséder une EINS à jour). Certains éléments ont été ajoutés, tels que :
Le niveau sonore au sein de l’établissement devient alors beaucoup plus élevé. Cela provoque une modification du paysage sonore de l’immeuble, qui est constatée par les riverains. Par conséquent, on parle de désordres acoustiques.
M. GAIL se retrouve confronté à une autre gestion : les allées et venues incessantes de son voisinage au sein de son établissement demandant de baisser le son lors des programmations.
Persuadé d’avoir fait appel à des professionnels pour l’installation de son système son, M. GAIL ne souhaite pas changer son organisation.
Le conseil syndical, voyant la situation des riverains stagner, a déposé auprès de la préfecture un dossier de plaintes contre l’établissement.
L’établissement « Chamallow » est alors confronté aux problématiques suivantes :
Le gérant se retrouve donc contraint de faire appel à un acousticien afin de mettre en conformité l’activité de son établissement.
*Les noms ont été changés
Crédit photo : Pixabay - Niek Verlaan
L’acousticien est déjà dans une situation en phase de litige dû à la méconnaissance du directeur concernant les lois et réglementations applicables pour ce type d’établissement.
Au vu du contexte, l’acousticien propose différents conseils à suivre tels que :
La situation entre l’établissement et la copropriété est telle qu’aucun lien avec les plaignants ne peut être établi par M. GAIL ainsi que par l’acousticien.
Un premier lien avec la préfecture et le service d'hygiène et salubrité de la ville est acté afin d’expliquer à ladite copropriété (sceptique du fait que l’établissement souhaite établir dorénavant une étude acoustique) la mission de l’acousticien.
Une date commune est finalement trouvée afin que tout le monde puisse être représenté. Sont présents :
Un tour de table est effectué afin d’écouter les desideratas des plaignants et retrouver un climat de confiance.
La mission de l’acousticien peut ainsi être expliquée au voisinage tout en précisant la neutralité de sa position. Pour ce faire, le professionnel du son explique aux plaignants que :
Quatre appartements sont alors choisis, à savoir :
*Les noms ont été changés.
Cependant, M. REAL refuse par courriel de donner l’accès à son logement pour réaliser la campagne de mesures acoustiques.
La préfecture propose que les mesures soient tout de même réalisées dans les autres appartements et que la plainte de M. REAL soit classée sans suite.
L’acousticien explique au gérant que la situation est favorable mais n’est pas idéale. En effet, l’appartement de M. REAL se trouve être la situation la plus contraignante d’un point de vue acoustique. Sauf que, c’est M. REAL qui est à l’initiative du dossier de plaintes concernant les nuisances sonores. Dans l’hypothèse d’un changement de propriétaire de l’appartement 1, l’établissement ne se retrouvera pas en conformité vis-à-vis du nouvel occupant et le dossier de plainte pourra être rouvert.
L’acousticien explique alors à M. GAIL qu’une date commune pour réaliser les mesures doit être statuée avec les 3 autres plaignants, et qu’il doit confirmer par un courrier recommandé avec accusé de réception aux 4 plaignants la date proposée.
M. REAL, ayant pris connaissance du courrier recommandé, refuse de nouveau catégoriquement toute accessibilité à son appartement.
Malgré la situation les démarches suivantes sont à prendre. Il faudrait :
L’acousticien demande qu’une réunion informelle soit de nouveau organisée en présence uniquement de :
Suite à cette dernière réunion, M. REAL a pu exprimer sa crainte quant à l’intrusion d’une personne tierce chez lui et a pu être rassuré quant au périmètre de l’intervention.
Une date d’intervention a pu être ainsi obtenue et confirmée par écrit par courrier recommandé avec accusé de réception.
Suite à la campagne de mesures acoustiques en milieu inoccupé, la non-conformité de l’établissement est confirmée sur l’ensemble du spectre 125 à 4 kHz. Il s'agit du nombre de variations par seconde de la pression acoustique. Elle se mesure en HERTZ (Hz). Les fréquences se classent en trois catégories: les infrasons (en dessous de 20 Hz);les fréquences moyennes (de 20 à 20000Hz) et les ultrasons (>20000Hz).
considéré par la réglementation.
Il a pu ainsi être observé les points suivants :
Le niveau sonore maximal mesuré dans l’établissement atteint 93 dBA.
Or, les calculs de contraintes vis-à-vis des riverains n’autorisent qu’un niveau sonore à 85 dBA, ainsi qu’une limitation de 10 à 15 dBL’oreille humaine traite l’information qu’elle reçoit de telle manière que « plus le bruit augmente, physiquement, autrement dit plus le tympan vibre fort, plus la perception physiologique que l’on a, la sensation auditive, augmente lentement ».L’oreille transforme ainsi des multiplications du bruit en petites additions de la perception auditives (les matheux auront reconnu la fonction logarithmique). C’est pour cette raison que les acousticiens expriment l’intensité de la sensation auditive sous forme d’une échelle de niveau sonore exprimée en décibel (dB). Cette échelle en dB est évidemment liée au phénomène physique qu’est le bruit mais elle traduit la sensation auditive que l’on a de ce phénomène dans notre oreille. Les appareils de mesure du bruit, les sonomètres, sont conçus pour reproduire ce fonctionnement de l’appareil auditif humain et évaluer les niveaux sonores de cette manière, exprimés en décibel.
dans les basses fréquences.
M. GAIL doit donc faire face à la réalité des mesures :
Suite à la campagne de mesures acoustiques en milieu occupé lors d’une soirée avec des sets DJ (musique de type électro), des observations complémentaires ont pu être ainsi faites par l’acousticien, à savoir :
Ces éléments ont ainsi permis d’identifier précisément l’origine des bruits ainsi que les fuites acoustiques. Des points d’améliorations ont étés fait dans le but de rendre conforme l’établissement vis-à-vis de la réglementation en vigueur.
** L'indice statistique L10 représente le niveau de pression acoustique pondéré A qui est dépassé pendant 10% de l’intervalle de temps considéré.
Les mesures acoustiques en milieu occupé et en milieu inoccupé ont permis au professionnel du son de définir le niveau sonore idéal au sein de l’établissement.
Néanmoins, devant l’impatience des riverains face à la situation, un limiteurUn limiteur est un appareil électronique équipé d’un microphone dont l’installation permet de garantir le non-dépassement des valeurs de réglages prescrites dans l’EINS. En cas d’atteinte du niveau prescrit, le limiteur peut soit atténuer le signal audio de la sonorisation (destiné aux discothèques ou bars musicaux)soit couper l’alimentation du système de diffusion (destiné aux salles des fêtes, salles polyvalentes).
acoustique est installé et ainsi paramétré/dimensionné : environ 85 dBA en global, avec un spectre assez faible en basse fréquence.
Il est également précisé à M. GAIL que :
L’ensemble du cahier des charges peut alors être rédigé par l’acousticien. Les solutions retenues sont les suivantes :
M. GAIL n’avait pas réalisé que des travaux de grande ampleur devraient être réalisés pour pouvoir exercer sans gêne son activité. Un budget total de plus de 60 000 € HT est nécessaire (après analyse des devis) alors qu’il l’avait estimé initialement à 10 000 € HT. Autrement dit, le directeur de l’établissement ne peut pas redémarrer son activité post-travaux, en raison de la somme trop élevée à payer. De plus, il ne bénéficie d’aucune aide et ne possède ni trésorerie, ni fonds de roulement.
M. GAIL souhaite ainsi savoir si son projet (soirées avec des sets DJ, …) est apprécié par sa clientèle et si cela mérite d’investir une telle somme, faute de quoi, des travaux mineurs seraient réalisés pour atteindre un niveau sonore moins élevé ce qui entrainerait cependant, l’annulation de son projet.
M. GAIL lance un appel à projet via une plateforme de crowdfunding auprès de sa clientèle/communauté.
En moins de 4 semaines, la plateforme devient virale grâce aux réseaux sociaux, aux forums et à la presse, sans oublier l’aide de la ville et de l’acousticien. Plus de 35 000 € sont alors réunis.
Par ailleurs, la plateforme crowdfunding a permis à l’établissement de se faire connaitre et ainsi d’augmenter sa cote de popularité auprès de la collectivité, des riverains, ce qui permet au directeur d’augmenter son chiffre d’affaires.
Un prêt travaux à faible taux est alors contracté avec la banque afin de combler la somme manquante.
Obtenir le montant des travaux visant à suivre le cahier des charges acoustiques ne signifie pas que le plus dur est fait. Le choix de l’entreprise est primordial. Cette dernière doit comprendre à la lecture d’une étude acoustique la complexité du dossier et toutes les contraintes nécessaires à la bonne réalisation du projet.
L’acousticien accompagne M. GAIL dans le choix des entreprises afin de s’assurer que ces entreprises (souvent un peu plus chères que les concurrentes) soient compétentes en acoustique.
Le professionnel du son est présent lors de l’exécution des travaux afin de vérifier tous les éventuels points singuliers, les défauts de mise en œuvre, les détails de mise en œuvre au niveau des jonctions. Par ailleurs, il valide l’ensemble des produits choisis par l’entreprise.
La durée du chantier étant de 5 semaines (au plus court pour redémarrer le plus rapidement possible), 10 visites de chantier ont été assurées par l’acousticien, à raison de 1 à 3 visites de chantier par semaine.
L’acousticien assure une dernière visite pour s’assurer que tout est bien mis en œuvre. Par ailleurs, il accompagne l’entreprise qui installe la sonorisation selon son cahier des charges et prérègle le limiteur acoustique au niveau sonore défini dans l’étude acoustique pour travaux. L’acousticien réalise quelques essais acoustiques dans l’établissement pour vérifier les mises en œuvre de certains éléments.
Il prévient M. GAIL que tout est aux normes pour enclencher une nouvelle étude d’impact acoustique EINS mais qu’en attendant, aucune soirée ne doit être organisée pour la simple et bonne raison que le limiteur doit être adapté au résultat des dernières mesures.
L’acousticien prévient également que le voisinage n’ayant pas été gêné par des soirées avec un niveau sonore élevé depuis la première étude d’impact acoustique (environ 10 mois), sera à l’affût du moindre bruit potentiel.
Le directeur de l’établissement reprend attache avec tous les plaignants et apprend que M. REAL a vendu son appartement entre temps. Les nouveaux propriétaires (M. et Mme BARNAUX*) ne sont pas au courant du litige qu’il y avait entre l’établissement « Chamallow » et la copropriété ; ils ne souhaitent pas donner l’accès pour réaliser les essais acoustiques.
Une nouvelle médiation est organisée entre tous les partis afin de :
M. et Mme BARNAUX acceptent finalement que les essais soient réalisés selon les conditions explicitées par l’acousticien.
M. GAIL prévient par courrier recommandé avec accusé de réception l’ensemble des partis pour la date convenue.
Les mesures de réception acoustique sont concluantes :
Le niveau sonore admissible au sein de l’établissement passe dorénavant à 102 dBA sur 15 minutes avec un spectre chargé en basses fréquencesVoir aussi : LEXIQUE / Basses fréquences.