Le traitement des nuisances sonores liées aux sons amplifiés par la Ville de Rennes et l'organisation du Service Sécurité Environnement

Contexte, organisation à l’échelon local

Rennes a sur son territoire environ 400 établissements susceptibles de diffuser de la musique amplifiée (bar, discothèques…). Il s'y produit également chaque année une quinzaine de « grands » festivals musicaux ainsi que d'autres évènements ponctuels ou récurrents. La plage horaire d'ouverture des débits de boisson s'étend de 7h00 à 1h00. Des dérogations sont accordées par la préfecture après avis de la maire pour les bars nocturnes qui peuvent ouvrir jusqu'à 3h du matin (ainsi que les bars dont l'exploitant est titulaire d'une licence entrepreneur de spectacles, avec fermeture à 3h00 les jours de spectacle).

Selon la nature des bruits issus des débits de boisson, plusieurs services de la Ville peuvent être concernés :

  • les nuisances en terrasse relèvent plus de la compétence de la police municipale qui contrôle le respect des prescriptions de l'arrêté octroyant l'autorisation d'une terrasses sur le domaine public (emprise au sol, horaires, non diffusion de musique sur la terrasse…).
  • Le service "réglementation" gère les licences et peut s'assurer notamment que la règle des 50 m minimum à respecter entre débits de boisson sur un périmètre du centre-ville est respectée.
  • La Direction Action Territoriale Tranquillité Publique (DATTP) pilote la charte de la vie nocturne adoptée en 2016. L'un des objectifs de la charte est le suivant : "S'assurer de la bonne tenue des débits de boissons en développant une démarche d'engagements réciproques entre les exploitants et les pouvoirs publics, permettant de mieux s'assurer du respect de la réglementation, de lutter contre l'alcoolisation excessive et de mieux réguler les fins de soirée".

Charte vie nocturne Ville Rennes

Charte de la vie Nocturne de la Ville de Rennes (lien pdf ici)

Commission de conciliation entre établissements nocturnes et riverains

Dans ce cadre, la DATTP propose une Commission de conciliation entre établissements nocturnes et riverains. Cette instance a été créée pour évoquer et rechercher collectivement des solutions aux difficultés de cohabitation entre des établissements (bars, restaurants, discothèques) et leur voisinage. Cet espace de dialogue réunit l'établissement et les riverains concernés, des représentants des cafetiers : UMIH et Culture Bar-Bars, deux habitants-référents, une représentante de la Police Nationale et deux représentants des services règlementaires de la Ville de Rennes. L'objectif est de renouer le dialogue et de rechercher ensemble des solutions permettant à chacun de continuer à vivre paisiblement.

La commission a été activée à sept reprises depuis sa mise en place en 2017 : il s'agissait d'une discothèque et de six bars de jour (fermeture à 1h00 du matin). La commission a permis de renouer le dialogue, très souvent rompu, entre les riverains et l'établissement mis en cause.

Les solutions, outre celles réglementaires comme la réalisation de l'étude d'impact et la pose d'un limiteur si nécessaire, sont souvent de petits efforts qui permettent aux riverains de retrouver un peu d'apaisement dans leur quotidien.

À titre d'exemple :

  • le retrait d'un baby-foot dont la présence pouvait générer des comportements bruyants ;
  • la pose d'un système de fermeture systématique de la porte d'un établissement pour éviter que la musique diffusée à l'intérieur n'en sorte ;
  • la matérialisation plus explicite d'une zone de terrasse pour éviter les débordements par les clients ;
  • le recrutement d'un agent de sécurité par un établissement pour s'assurer de la bonne gestion de celui-ci et limiter les nuisances sonores de la clientèle, particulièrement au moment de la fermeture.

Dans la totalité des situations, lors du bilan à + 3 mois de mise en œuvre des mesures, une amélioration a été confirmée sur au moins un des points soulevés par les riverains, et souvent mêmes plusieurs de ces points.

Le compte-rendu de la commission constitue un repère et un appui très utiles pour rappeler les engagements pris par l'établissement lorsque de nouvelles plaintes sont exprimées. Le bilan à + 3 mois permet aussi d'encourager le gérant à poursuivre ses efforts lorsque les effets sont ressentis positivement par les riverains.

Modalités de traitement des réclamations de voisinage par le Service Sécurité Environnement

Le Service Santé Environnement répond aux plaintes des habitants relatives aux nuisances sonores (bruit d'activité, bruits liés à la musique amplifiée…) en effectuant notamment des mesures de bruit et en menant les procédures administratives et pénales qui s'imposent si besoin. Il intervient en prévention dans le contexte de demande de dérogations ou en amont de la tenue de festivals, comme cela a été le cas pour Rock'n'Solex.

Après s'être assuré que le plaignant a informé l'établissement mis en cause des nuisances occasionnées, le Service Santé Environnement intervient de façon amiable auprès du gérant du débit de boisson, réalise des mesures de bruit en évaluant la gêne au regard du Code de l’environnement et du Code de la santé publique.

Lorsque les émergences sonores sont supérieures aux valeurs maximales fixées par la règlementation, une démarche est engagée auprès du responsable des nuisances. Tout d’abord, un courrier de rappel de la réglementation est adressé au gérant de l’établissement.

Pour les établissements déjà équipés d’un limiteur, les agents du Service Santé Environnement relèvent par ailleurs l’historique de l’appareil en cas de nuisance sonore signalée par les riverains (à noter l’intérêt de la récupération des données via wifi sur les limiteurs récents).

En l’absence de règlement amiable de la situation, des procédures sont engagées :

  • Administratives : courrier de mise en demeure de se mettre en conformité avec la réglementation, saisine du service débit de boissons de la préfecture pour une sanction administrative.

La fermeture administrative, selon ses modalités, n’est pas toujours efficace. On peut citer l’exemple d’un bar fermé pour une semaine pour non-présentation d’étude acoustique et constat d’émergences sonores : à l'issue de la semaine, l'exploitant n'a pas pris de dispositions complémentaires, les nuisances perdurent, une nouvelle procédure à l'égard de l'exploitant va devoir être engagée ; la procédure de suspension d'activité musicale parait plus adaptée et efficace.

  • Pénales : procès-verbal d'infraction transmis au procureur de la république (motif : non présentation d'étude acoustique, préconisations de l'étude acoustique non appliquées telles que : absence de limiteur, dépassement d'émergence règlementaire…).

Remarque : 2 à 6 procès-verbaux d’infraction sont transmis au procureur par an pour les ERP (établissements recevant du public) diffusant de la musique amplifiée.

Contrôles nocturnes du Service Sécurité Environnement

Dans sa pratique, le Service Sécurité Environnement effectue des « contrôles » nocturnes, une fois à l’automne et une fois au printemps. Cette soirée est réalisée en binôme et permet, au-delà des mesures chez les riverains et de l’analyse sur dossier, de mieux appréhender la situation en direct. La déambulation démarre vers 22h30 et s’achève vers 1h00 ou 3h00-4h00 du matin, selon le type de bar à appréhender (fermeture tardive ou non) ou s’il s’agit de discothèques. À cette occasion, tous les bars pour lesquels des questions se posent sont observés simplement de l’extérieur pour évaluer dans quelle mesure la musique se diffuse dans l’environnement ou visités à l’intérieur avec rencontre du responsable d’établissement. Ces visites permettent de repérer des anomalies.

Dérogations bars nocturnes

Concernant les dérogations bars nocturnes, l'avis du Service Sécurité Environnement relatif au bruit est favorable si le demandeur fournit l'EINS relative à son établissement et a pris les dispositions préconisées par cette étude (par exemple, pose d’un limiteur). À réception de l'étude, le Service Sécurité Environnement échange oralement avec le bureau d'étude ; si des aspects nécessitent explication ou précisions, le rapport peut donc dans certains cas être amendé.

Ensuite, une visite sur place est réalisée pour vérifier la mise en place du limiteur, la position du microphone, la concordance du matériel de sonorisation décrit dans l'étude avec le matériel effectivement en place et, depuis la parution du décret de 2017, la présence de bouchons d’oreille et de l’information du public sur les risques auditifs.

Remarque : l’EINS n’est pas demandée systématiquement pour les autres bars ; cependant en cas de réclamation du voisinage pour un motif de nuisances sonores, le Service Sécurité Environnement l’exige. L’EINS est par ailleurs sollicitée dans le cadre des procédures d’urbanisme (avis du Service Sécurité Environnement sollicité par la direction de l’Urbanisme pour les déclarations préalables et les permis de construire).

Mesures d'ambiances sonores

Depuis 2006, le Service Sécurité Environnement réalise également des mesures d’ambiance sonore, en 8 points du centre historique. La comparaison interannuelle permet en particulier de constater que malgré la mise en conformité progressive (mais non terminée) des établissements rue st Michel, des niveaux sonores très élevés sont observés (diffusion de musique portes ouvertes, bruit de la foule dans la rue).

 

Mesures de niveau sonore par les services de la Ville de Rennes (Source : Service Sécurité Environnement)

 

Apports du décret pour le Service Sécurité Environnement - modalités d'utilisation

Elargissement des lieux concernés avec la parution du décret

La parution du décret du 7 août 2017 a élargi les lieux concernés. Faute d’arrêté d’application, le Service Sécurité Environnement n’a pas réalisé d’information vers ces nouveaux établissements (exemples :  cinémas, manifestations sportives sonorisées, etc…).

En l’absence de parution d’un arrêté, dès lors que la note d’information technique et le guide seront publiés, le Service Sécurité Environnement envisage d’informer les organisateurs des règles applicables aux festivals et évènements sonorisés, via notamment les services pilotes internes à la ville de Rennes (Direction de la Culture, Direction Association Jeunesse Egalité, etc.). Il pourra être proposé aux organisateurs de mener une concertation préalable avec les riverains (information, contact disponible, négociation sur les modalités du festival…) pour permettre une meilleure acceptabilité des événements.

Cas du festival Rock'n Solex

Le festival Rock’n Solex occasionnait de nombreuses réclamations de riverains depuis plusieurs années. Selon la direction des vents, les habitants de Rennes et/ou de la commune limitrophe étaient concernés. Le Service Sécurité Environnement a saisi l’opportunité de la sortie du décret pour mieux gérer la situation.

Ainsi, pour l’édition 2018, une étude d’impact a été demandée. L’étude a été menée en trois phases :

  • Avant l’évènement : modélisation de la répartition sonore au niveau du public et des habitations et définition des valeurs limites permettant l’exploitation du festival, le respect des seuils réglementaires pour le public et la limitation de l’impact pour le voisinage ;
  • pendant le montage et après calage : vérification que les niveaux limites définis en première phase permettent de respecter la protection du public ;
  • pendant le festival : niveaux maximum autorisés affichés sur chaque scène pendant les intersets pour sensibiliser le public.

Les résultats ont été probants cette année-là avec l'absence de réclamations des riverains.

Pendant les visites de contrôle du Service Sécurité Environnement

Lors des visites de contrôle effectuées par le SSEnv, il est demandé si des protections auditives sont mises à disposition du public. En général, les exploitants l’ont bien prévu mais la signalisation au public de leur présence ne parait pas suffisante (disponibilité plutôt sur demande).

Concernant les affiches ou autres supports de sensibilisation aux risques auditifs, ils sont assez absents des lieux clos. Le SSEnv a proposé occasionnellement le support de l'INPES (maintenant Santé Publique France) ou le kit du ministère de la Santé.

Il parait nécessaire de proposer aux exploitants de lieu, des supports de communication prêts à l'emploi pour faciliter la mise en application de la règlementation.